Dossier : désherbage

Depuis toujours en maraîchage biologique la présence des adventices des cultures, appelées communément « mauvaises herbes » est un fléau et reste une des premières préoccupations du maraîcher. La prolifération des adventices peut-être très nuisible à la culture au niveau de la qualité et de la productivité, elles rentrent en compétition avec la culture au niveau de la lumière, de l’eau, et des éléments nutritionnels. La maitrise de l’enherbement est donc un enjeu important et est à considérer sérieusement en termes de temps de travail, de rendement des cultures et d’investissement financier.

Le désherbage est souvent placé en second plan dans l’organisation des activités de la ferme, hors il est à prendre en compte et mérite réflexion avant et pendant l’installation des cultures.
Le choix entre chaque type de maitrise de l’enherbement devra considérer la surface cultivée (ferme modeste ou moyenne ou surface plus importante), le temps passé au désherbage, les moyens financiers et l’impact sur l’environnement.
Bien entendu, les principes de base en maraîchage biologique que sont l’assolement (répartition des cultures sur les parcelles) et la rotation sont en eux même un moyen de lutter contre l’installation des adventices.
Il est également fondamental d’intégrer dans la rotation l’implantation des engrais verts qui sont aussi un moyen de lutter contre les adventices.

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A quel stade attaquer les adventices ?

Il est important d’intervenir le plus tôt possible lorsqu’elles sont au stade cotylédon voir une feuille vraie. Par ailleurs la présence à forte densité d’adventices réduit considérablement l’aération de la culture et ainsi augmente le risque de développement de maladies. Pour finir, pour éviter d’augmenter la quantité de graines d’adventices au sol, il est conseillé de détruire les plantes des engrais verts ou des zones voisines enherbées avant la montée à graines.

Choix de la densité de plantation et du système d’irrigation

La définition de la largeur de l’inter-rang sera déterminante pour l’utilisation des outils de désherbage présents sur la ferme en facilitant leur passage. La densité de semis est à réfléchir tout d’abord pour le bon développement de la culture mais aussi pour éviter de laisser trop d’espace au développement des adventices. Attention une trop forte densité nuit au développement des adventices mais peut-être fatale à la culture et facilite le développement des maladies cryptogamiques.
Dans le même sens le choix du type d’irrigation sera fondamental pour la levée des adventices, en intégrant le fait d’arroser la culture au moment où elle en a le plus besoin et d’éviter les excès d’eau, le goutte à goutte reste la pratique la plus efficace contre le développement des adventices contrairement à l’aspersion qui facilitent leur levée et croissance.

Différents outils et techniques de désherbage

Technique du faux semis

Il s’agit d’une technique de désherbage mécanique visant à éliminer une grande partie (40 à 75%) du stock de graines d’adventices présentes dans vos sols. C’est une gestion et une maîtrise de l’enherbement permettant aux futures cultures d’être nettement moins enherbées.
Travaillez votre sol pour préparer un lit de semence par un travail superficiel (inférieur à 8 cm). Laissez germer les graines d’adventices de vos cultures. Si le temps est sec il est conseillé d’irriguer dans le but de favoriser la levée des adventices. Dès l’apparition des plantules (au stade cotylédons ou au maximum au stade deux feuilles) procédez à leur destruction mécanique ou destruction thermique.
Il est recommandé de réaliser des faux-semis pour vos semis direct en pleine terre de carottes, oignons, poireaux, mesclun et autres jeunes pousses mais aussi d’engrais verts. Le faux-semis et donc la gestion de l’enherbement est un enjeu majeur en agriculture biologique.
Répéter cette pratique 2 à 3 fois toutes les 2 semaines.

Avantages : Peu coûteux – faible impact environnemental – convient à toutes tailles de ferme – la majorité des mauvaises herbes lèvent en même temps.
Inconvénients : Prévoir un mois sans culture sur la parcelle.

	Désherbage manuel ou avec petit outillage (binette, sarclette, houes maraichères à roues) Consiste à retirer à la main ou avec des petits outils manuels, les adventices sur le rang et inter-rang de la culture. Avantages : Très économique, aucun impact sur l’environnement, efficace. Inconvénients : Très chronophage – adaptable seulement au petite surface.
	Avec des outils tractés Consiste à atteler au tracteur un outil soit à dents, soit animé de façon rotative avec la prise de force (Rotavator) pour passer sur l’inter-rang de la culture et ainsi retirer les adventices. Pour les outils fixes, le tracteur peut-être remplacé par un attelage de chevaux. Avantages : Aération du sol – gain de temps – faible impact sur environnement – efficace Inconvénients : Onéreux – ne travaille que l’inter-rang.
	Implantation d’engrais verts Consiste à implanter des espèces fourragères à croissance rapide qui vont couvrir le sol et ainsi empêcher les adventices de se développer. Ils seront ensuite détruits par roulage ou broyage, réincorporés ou laissés au sol afin que leur décomposition alimente le sol en éléments nutritifs. Avantages : Peu coûteux – aucun impact sur l’environnement – évite l’érosion du sol. Inconvénients : Occupation de la parcelle pendant 2 à 3 mois.
	Installation de film plastique et toile tissée Consiste à déposer sur le sol un film plastique biodégradable ou une toile tissée qui mécaniquement empêcheront la levée des adventices du fait de l’absence de lumière. Avantages : Film plastique réutilisable jusqu’à deux ans – toile tissée réutilisable plusieurs années – film plastique biodégradable pas réutilisable – améliore la précocité des cultures – très efficace sur le rang. Inconvénients : Onéreux – fort impact sur l’environnement – Pour le film plastique et la toile tissée usagés, le recyclage est compliqué et coûteux.
	Désherbage par occultation Consiste à poser sur la parcelle un film plastique opaque, ainsi les graines d’adventices germent et ces dernières sont détruites par l’absence de lumière. Cette technique peut être réalisée avec de la bâche d’ensilage, de la toile tissée ou du paillage végétal. Avantages : Peu coûteux – faible impact sur l’environnement – convient à toutes les tailles de ferme – gain de temps – bâches réutilisables plusieurs fois. Inconvénients : Prévoir un à deux mois sans culture sur la parcelle.
	Désherbage par solarisation Consiste à arroser copieusement le sol pour que l’eau soit vectrice de chaleur en profondeur. Puis poser une bâche transparente au sol et fermer la serre. La chaleur déployée au sol peut atteindre les 50°C. Avantages : Peu coûteux – faible impact environnemental – uniquement sous tunnel – détruits les graines d’adventices sur 10 cm de profondeur et les pathogènes . Inconvénients : Prévoir un à deux mois sans culture sur la parcelle.
	Désherbage avec motoculteurs ou motobineuses Consiste à passer sur l’inter-rang un outil rotatif autotracté qui arrache les racines des adventices. Avantages : Intéressant pour les petites surfaces – outil léger – efficace – peu d’impact sur l’environnement – économique. Inconvénients : Travail en profondeur – moyennement chronophage.
	Désherbage thermique Consiste à détruire les adventices par brûlage direct avec une flamme. Avantages : Impact moyen sur l’environnement – pratique pour la destruction de levée d’adventice après faux semis – facile à utiliser. Inconvénients : Onéreux – risque d’incendie, à utiliser seulement à l’extérieur – efficace que sur très jeunes plantules.
	Désherbage à la vapeur Consiste à injecter de la vapeur sur les dix premiers centimètres du sol, cette méthode entraine une élévation de la température jusqu’à 80°C et ainsi inhibe la germination des graines d’adventices. Avantages : Destruction des adventices en profondeur et de certains pathogènes. Inconvénients : Onéreux – chronophage – fort impact sur l’environnement – détruit les organismes vivants indispensables au bon fonctionnement du sol.
	Désherbage par paillage Consiste à épandre sur la culture sur le rang et l’inter-rang une épaisseur de paille (15 cm) ou BRF (broyage de petit bois, branches compostés pendant 8 mois au moins…) (7 cm) qui par leur effet couvrant limiteront la levée des adventices. Avantages : Aucun impact sur l’environnement – ralentit l’évaporation et l’érosion du sol – améliore la structure et enrichit le sol. Inconvénients : Chronophage (opération à répéter plusieurs fois) – moyennement coûteux – sensible au vent – apports de graines et parfois de maladies.
	Désherbage avec un robot Pratique le désherbage seul sur le rang et inter-rang. Avantages : Gain de temps – efficace – économie en fatigue – faible impact environnemental – Léger évite le tassement des sols. Inconvénients : Très très onéreux – Très difficile d’utilisation sur les terrains pentus.

Ces différentes méthodes sont évidemment étroitement liées aux outils présents, à la taille et au niveau d’investissement financier de la ferme. Il est important de savoir que beaucoup de maraîchers auto-construisent leurs outils, pour cela vous pouvez vous adresser à la coopérative de l’atelier paysan www.latelierpaysan.org qui propose des documents et formations pour l’auto-construction d’outils maraichers.

Les erreurs à ne pas commettre

L’organisation générale du travail sur la ferme tient compte des tâches prioritaires que sont les préparations de parcelles, les semis, les plantations, les récoltes, la commercialisation, relayant de fait le désherbage, souvent, comme une activité secondaire. Il est important pour que le désherbage ne devienne pas la corvée de trop de l’inscrire en priorité et pour cela vous trouverez ci-dessous quelques pistes d’erreur à ne pas commettre.

Préparation des planches : Une mauvaise préparation du sol ou une absence de faux semis faute de temps, aura des répercussions dramatiques pour le temps à consacrer au désherbage pour la suite de la culture.

Entretien et suivi des cultures : Un manque de suivi et donc d’entretien implique indiscutablement un développement et un envahissement des adventices. L’éloignement des parcelles peut parfois en être la cause.

Réglage des outils : Ne pas noter le réglage des outils pour le passage sur telle ou telle culture occasionne une perte de temps pour les passages suivants.

Adéquation entre surfaces cultivées et main d’œuvre : une mauvaise estimation du temps à passer entre les surfaces cultivées et la main d’œuvre présente sur la ferme impliquera fatalement un retard sur le désherbage.

Pour plus d’information, vous pouvez vous munir du guide « Vers une approche globale du désherbage sur les fermes maraîchères diversifiées en AB », ce guide est une publication de la commission légumes Grand Ouest du réseau FNAB, il est élaboré à partir de nombreux témoignages de maraichers.
Pour vous le procurer rendez-vous : www.agrobio-bretagne.org

Sources bibliographiques :

« Vers une approche globale du désherbage sur les fermes maraichères diversifiées en AB »
Commission légumes Grand ouest du réseau FNAB

« Guide de gestion des adventices en maraîchage biologique »
CIVAM bio 09 et ERABLES 31